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mardi 6 novembre 2012

TVA sociale, tu perds ton sang-froid


Repost du 09/03/2012 11h49

L’idée de « TVA sociale » est dans l’air depuis un certain temps déjà, elle a pris de la substance depuis les annonces du chef de l’Etat. Découlant de la rigueur allemande, elle est censée redresser les torts de la mondialisation. De quoi parle-t-on au final ?


Un nom d’emprunt

Les politiques l’appellent TVA sociale, mais son vrai nom, qu’elle cache bien dans toute cette histoire, est dévaluation fiscale ! En effet, avant de jouer les Robins des Bois de la fiscalité, il s’agit bien d’un mécanisme économique connu, mais qui a été peu utilisé en grandeur nature jusqu’à présent.

C’est une dévaluation, car son objectif est de reproduire les effets d’une dévaluation du taux de change, mais fiscale, car il est question d’utiliser les impôts (directs et indirects) pour ce faire, plutôt que de toucher au cours de l’Euro, ce que le gouvernement français ne peut pas faire de toutes façons.

Regardons de plus près son mécanisme :

La TVA sociale c'est quoi ? by zoomzoomout

 

Le dessous du coup de poker

Même si la recherche économique est pour le moment en retard par rapport au débat politique, elle semble se diriger vers un consensus concernant l’efficacité théorique et la faisabilité de la dévaluation fiscale. Cependant, le manque de précédant historique semble exiger une certaine prudence. Les modalités pratiques optimales ne sont pas claires, compte tenu de la complexité du système d’imposition. D’autre part, il est possible (mais peu probable au vu des mesures allemandes de 2007 de TVA à visée sociale) que d’autres Etats membres l’appliquent aussi comme mesure de rétorsion, ce qui rendrait la dévaluation moins efficace.

Le débat actuel en France porte sur l’atteinte aux revenus des plus pauvres. La TVA sociale renchérira bien sûr le coût de la consommation pour les plus pauvres car une portion des biens consommés, importés de l’extérieur, verront de toute façon leur prix augmenter. Une autre source de problème est la régressivité de la TVA, en ce sens que les plus pauvres payent proportionnellement plus de TVA que les plus riches. Ce sont les deux éléments les plus importants à mon sens. Une solution serait de ne réduire les charges sociales que des bas salaires. Là aussi, l’effet réel est difficile à prévoir, mais selon le FMI, cela démultiplierait les effets sur l’emploi.

On entend par ailleurs souvent que les entreprises ne vont pas répercuter la baisse des charges sociales afin d’améliorer leurs marges. Pourtant, jusqu’à preuve du contraire, la TVA sociale ne va pas remettre en cause le fait que les entreprises se font concurrence ; mais il y a un fonds de vérité à cela : les prix sont rigides et s’ajustent lentement, à la hausse comme la baisse. Cependant, l’amélioration des marges des entreprises devrait les pousser à investir et à embaucher.

C’est Angela qui l’a dit

L’Allemagne a déjà mis en place une telle politique en 2007, et c’est bien sur cette expérience que Nicolas Sarkozy s’appuie pour vanter les mérites de la TVA sociale. Cependant ses effets Outre-Rhin sont encore loin d’avoir été quantifiés complètement, et les différences de modalités d’application sont susceptibles de créer des différences importantes. Pour le social, on repassera comme le souligne Thomas Piketty dans un article pour Libé, mais du point de vue strictement économique, le but de la manœuvre est de soutenir l’emploi quantitativement et non qualitativement.

Finalement, même si c’est un dispositif qui présente beaucoup d’avantages directs pour les entreprises, par les temps de rigueur fiscale qui courent, l’Etat va avoir beaucoup de mal à continuer à être le moteur de la création d’emploi après le coup de semonce de la perte du AAA. La voie du privé est donc une issue, à savoir si c’est la bonne…

Pour en savoir plus :
Deux articles d’Emmanuel Farhi, économiste français de Harvard, l’un académique disponible ici ou là,
l’autre moins http://web.mit.edu/iwerning/Public/VAT.pdf